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La culture des diètes: une charge mentale trop lourde

25 avril 2023

ÉquiLibre

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Pour une image corporelle positive

Temps de lecture 4 minutes
La culture des diètes est omniprésente dans notre société. Que ce soit à l’aide de remises en forme intensives, de règles culpabilisantes ou de diètes restrictives, de nombreuses personnes essaient désespérément de contrôler leur poids. Comment se libérer de cette charge mentale tout en prenant soin de sa santé? On en discute avec Andrée-Ann Dufour Bouchard, nutritionniste et cheffe de projet chez ÉquiLibre.
Q
Comment se manifeste la charge mentale causée par la culture des diètes?
R

On veut tous et toutes être en bonne santé. Mais dans notre société obsédée par la minceur, il est facile de sentir la pression écrasante qui nous pousse à nous conformer à cet «idéal», pourtant très irréaliste. On se fait constamment bombarder par de nouvelles publicités de diètes, par des messages sur ce qu’on devrait manger pour maigrir, l’entraînement le plus «efficace» auquel on doit s’astreindre pour modeler son corps, les restrictions qu’on doit s’infliger. Pas étonnant que tant de gens souffrent d’anxiété liée à leur poids! Selon un sondage réalisé par Léger en août 2022 pour ÉquiLibre, 62 % des Québécois et Québécoises veulent maigrir, peu importe leur poids, et 42 % ressentent du stress en raison de leur poids1.

On se sent coupable de manger certains aliments et on s’oblige souvent à pratiquer des activités physiques qu’on n’aime pas. Cela a un impact considérable sur notre rapport à la nourriture et à l’exercice. Ça affecte aussi notre vie sociale. Certaines personnes vont se priver d’aller au resto avec leurs proches par crainte d’ingérer trop de calories!

Les personnes qui se sentent prises au piège de la culture des diètes souffrent souvent d’une faible estime d’elles-mêmes et d’une image corporelle négative, car elles s’efforcent d’atteindre un objectif inaccessible et s’attribuent le blâme de l’échec plutôt que de remettre en question l’efficacité de la méthode.

Elles peuvent également éprouver un sentiment de culpabilité ou de honte lorsqu’elles se laissent tenter par des aliments «interdits», ou se sentir constamment anxieuses et accablées par la pression qu’elles subissent pour maintenir leur poids. Cela peut notamment conduire à des troubles de l’alimentation, qui peuvent causer des dommages supplémentaires.

Q
Pourquoi notre société met-elle autant l’accent sur le contrôle du poids?
R

La minceur est très valorisée dans notre société. La culture des diètes nous fait croire qu’on peut perdre du poids facilement, alors qu’en réalité de nombreux facteurs incontrôlables entrent en jeu (la génétique, l’âge, l’arrivée de la ménopause, la prise de certains médicaments, etc.). Cette mentalité nous pousse à nous peser régulièrement et à laisser le chiffre sur la balance dicter notre humeur, même s’il ne s’agit que de quelques grammes en plus ou en moins par rapport à la veille.

De plus, de nombreuses croyances blessantes ou non fondées sur le poids (les personnes grosses* seraient paresseuses, manqueraient de discipline ou de maîtrise de soi, etc.) peuvent nous inciter à vouloir éviter de prendre du poids. Ces messages sont omniprésents et créent un sentiment d’urgence à être mince, quel qu’en soit le coût. Durant la pandémie, beaucoup de personnes s’inquiétaient davantage de prendre du poids que du virus lui-même. Ce n’est pas banal!

* L’adjectif «grosses» est un qualificatif descriptif utilisé pour désigner la grosseur sans connotation péjorative.

L’industrie de la perte de poids est énorme et très lucrative. Elle est une des seules industries inefficaces à long terme qu’on ne remet pas en question. Si une autre industrie avait un taux de réussite aussi bas, elle aurait des comptes à rendre!

Q
Que peut-on faire pour se libérer de cette charge mentale?
R

Les 3 attitudes suivantes peuvent nous aider à alléger la charge mentale créée par la culture des diètes.

1. Reconnaître notre valeur

La première étape consiste à reconnaître que notre poids ne définit pas notre valeur. Il faut travailler à se détacher du modèle de beauté irréaliste que la société nous présente, à faire le deuil d’un corps «parfait» et à cesser d’émettre des commentaires sur notre poids et celui des autres. On peut également apprendre à apprécier notre corps pour tout ce qu’il nous permet de faire, indépendamment de son apparence.

2. Travailler notre relation avec la nourriture et l’activité physique

Il est également important de prendre soin de soi en étant à l’écoute des besoins de notre corps plutôt qu’en étant dans une optique de «contrôle» à son égard. On peut réapprendre à faire confiance à notre corps en reconnaissant les signaux de la faim et en les écoutant. On peut faire la paix avec les aliments «interdits» et apprendre à identifier nos vraies préférences, manger une variété d’aliments sans se culpabiliser. On consacre du temps à des activités physiques qui nous apportent de la joie et on se montre flexible. On a un cours de Spinning une journée et on ne se sent pas en forme pour y aller? On fait une marche à la place ou on accepte que notre corps a besoin de repos aujourd’hui. Tout cela est favorable au maintien de ses habitudes de vie à long terme, ce qui est bon autant pour notre santé physique que mentale!

3. Faire le ménage de nos réseaux sociaux

On peut aussi se désabonner de comptes de personnalités sur les réseaux sociaux qui nous font nous sentir mal chaque fois qu’on clique sur leur profil et en profiter pour diversifier les comptes auxquels on s’abonne. Il est même possible de masquer les publicités de diètes afin de ne plus être la cible de ce type de contenu.

En reconnaissant notre propre valeur, en prenant soin de notre bien-être physique et mental et en remettant en question les attentes de la société, on peut créer une relation plus saine avec la nourriture et notre propre corps.

Merci à Andrée-Ann Dufour Bouchard, nutritionniste et cheffe de projet chez ÉquiLibre, pour sa collaboration à cet article, réalisé à l’occasion de la Semaine sans diète.


Source
1. Léger pour le compte d’ÉquiLibre (2022). Préoccupations envers le poids, l’alimentation et la pratique d’activité physique. Sondage réalisé du 2 au 21 août 2022 auprès de 1808 Québécois et Québécoises âgé(e)s de 14 ans et plus.
© Photo de SHVETS production provenant de Pexels
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