La contribution aux changements climatiques des tomates poussant dans un champ à des milliers de kilomètres au sud tout autant que celles produites ici dans des serres en plein hiver reste nébuleuse. De nombreuses équipes de recherche se sont pourtant penchées sur la question. Une équipe de l’Université de la Colombie-Britannique a par exemple comparé des tomates produites en serre localement à d’autres cultivées dans des champs en Floride. Résultat: il vaudrait mieux manger les premières. Toutefois, le même exercice mené en Nouvelle-Angleterre, sur la côte est américaine, avec cette fois-ci des tomates mexicaines de plein champ, aboutit au résultat inverse.
Ces contradictions viennent des considérations géographiques et techniques qui font varier l’impact d’une tomate sur le climat. Pour un même type de tomate, l’empreinte carbone peut changer d’une ferme agricole à l’autre et d’une région à l’autre.
Malgré le mystère entourant les tomates, nous avons mené une enquête pour vous aider à y voir un peu plus clair.
Pour mesurer l’impact d’un aliment, d’un objet ou d’un service sur le climat, le meilleur outil est l’empreinte carbone, qui s’apparente à une enquête répertoriant les gaz à effet de serre (GES) émis durant tout son cycle de vie. Pour les tomates, les GES sont quantifiés de la graine à la production du fruit, en passant par la vente de celui-ci, son éventuelle transformation et sa fin de vie quand il atterrit dans la poubelle ou au compost.
Une question de transport
En comparant uniquement la phase de production des tomates, on constate que celles produites en plein air émettent moins de GES que leurs équivalents produits en serre. Cependant, le transport des tomates des champs cultivées à des milliers de kilomètres alourdit considérablement leur impact sur le climat. Par exemple, le voyagement des tomates des champs par camion sur une distance de plus de 5000 km compte pour 75 % de leur empreinte carbone si on les compare à des tomates de serre cultivées localement.
Des serres énergivores
Faire pousser des tomates en serre a la cote au Québec: chacun et chacune d’entre nous en consomme en moyenne 4,4 kg par an, et elles représentent 60 % de la production québécoise de tomates. Les serres ont un grand avantage: elles permettent de cultiver à l’année malgré des températures froides et une luminosité moindre. Cependant, il faut beaucoup d’énergie pour chauffer et éclairer les serres. Si bien qu’à Boston (pas si loin de chez nous), les GES d’une serre chauffée au gaz naturel rattrapaient ceux émis par le transport de tomates de champ importées du Mexique.
Heureusement, depuis quelques années, l’empreinte carbone des serres québécoises diminue, alors que plusieurs chauffaient leurs serres au mazout, un combustible fossile au lourd bilan en GES, se tournent vers des énergies renouvelables comme l’hydroélectricité, la biomasse de résidus forestiers ou le biogaz.
On achète quoi finalement?
Il y a un choix évident: manger des «tomates de plein air», qui ont poussé dans son jardin, chez le maraîcher du coin ou à tout le moins au Québec. De cette façon, on évite les émissions liées aux serres et on limite celles liées au transport. Profitez-en durant la belle saison pour en acheter en grande quantité afin de faire des conserves. Vous aurez ainsi les meilleures tomates pour le climat dans votre garde-manger à l’année.
Pour ceux et celles qui ne se lancent pas dans les conserves, le choix climatique est un dilemme délicat à résoudre hors saison. En attendant qu’on ait des «étiquettes carbone» sur nos aliments, pourquoi ne pas baser votre choix sur d’autres critères, comme le soutien à l’économie locale? Les agriculteurs et agricultrices du Québec apprécieront!
Merci à Unpointcinq, le média de l’action climatique au Québec, pour la rédaction de cet article.