Qu’on l’éprouve en amitié, au travail entre collègues ou en amour, la jalousie fait partie de la nature humaine. Plutôt que de juger sévèrement cette émotion, la psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier nous invite à prendre le temps de la comprendre, car elle reflète tout simplement le désir de se faire aimer.

Pourquoi éprouve-t-on de la jalousie?

On éprouve de la jalousie lorsqu’on a l’impression qu’on pourrait perdre l’amour de l’autre. Comme si on sentait que notre lien à l’autre était menacé. La jalousie est donc une réaction de défense pour éviter de perdre l’autre. On éprouve cette jalousie autant dans nos relations amoureuses que dans nos relations amicales, familiales et professionnelles.

À la base, la jalousie naît parce que nous sentons un lien avec l’autre. Le contraire de la jalousie serait l’indifférence. La jalousie agit comme un signal d’alarme très utile qui nous dit qu’on est en danger de perdre ce lien avec l’autre.

Mais parfois, on s’imagine qu’il y a un danger de perdre l’autre. Le «signal-jalousie» s’active et on se met à la recherche d’indices pour se prouver à soi-même qu’on va assurément perdre cette personne.

Les 3 composantes de jalousie

Bien que la jalousie soit une émotion normale, elle devient problématique lorsqu’elle envahit nos émotions, biaise nos pensées ou nous fait poser des gestes contrôlants et hostiles. Ce sont ainsi les trois formes que peut prendre la jalousie.

1. Émotions jalouses

La jalousie renvoie à un mélange de plusieurs émotions. D’abord, on peut ressentir une anxiété qui provient de l’incertitude («Je ne sais pas si je vais perdre l’autre. Je ne sais pas si l’autre personne va préférer la présence d’une autre personne à la mienne.»). On peut ensuite éprouver une peur de la perte et de la trahison. Ajoutons une potentielle colère liée au fait de se faire manipuler, humilier, traiter injustement, et la confusion de ne pas savoir réellement ce qui se passe. On peut vivre de l’ambivalence à propos de la relation, ayant l’impression d’aimer une personne qui pourrait nous blesser.

2. Pensées jalouses

Avec la jalousie, c’est tout un système de détection de la menace qui est mis en place pour se rassurer ou tester la personne aimée. On ressent un besoin profond de mettre au jour la «vérité» ou la «tromperie». Ça équivaut, pour notre esprit, à partir à la recherche de preuves et, s’il n’en trouve pas, c’est simplement qu’on n’a pas encore trouvé cette vérité.

Mais ce faisant, on peut avoir tendance à rechercher des informations qui viendraient confirmer notre croyance (ex.: «Son regard s’est attardé plus longtemps sur cette personne, ce qui démontre son attirance.») et à diminuer l’importance des nouvelles informations qui vont à l’encontre de notre croyance (ex.: ne pas accorder d’importance au fait que la personne aimée me propose régulièrement que l’on passe du temps ensemble et qu’elle me communique son amour).

3. Comportements jaloux

La jalousie peut nous mener à avoir des comportements contrôlants, et parfois agressifs ou violents. Voici quelques exemples de comportements jaloux:

  • Surveiller l’être aimé;
  • L’interroger;
  • Rechercher des indices (ex.: consulter son GPS, son cellulaire, examiner ses amis, amies et personnes auxquelles il est abonné dans les réseaux sociaux et celles qui sont abonnées à ses comptes);
  • Dévaloriser l’être aimé;
  • Bouder et se retirer;
  • Dénigrer la personne qu’on s’imagine rivale;
  • Faire sentir à l’autre sa chance de nous avoir et le peu de chances d’attirer une autre personne;
  • Menacer ou punir (ex.: menacer de mettre un terme à la relation, parler négativement de l’être aimé aux autres, faire la grève du sexe, menacer de violenter);
  • Se prévoir des options de rechange (chercher déjà un remplaçant ou une remplaçante).

4 moyens d’apprivoiser ma jalousie

1. Identifier mes émotions jalouses et mes pensées jalouses intrusives

  • Comment est-ce que je sens la jalousie dans mon corps (ex.: poitrine serrée, impression de vertige)?
  • Est-ce que j’ai peur de perdre l’autre? Est-ce que je sens du rejet?
  • Est-ce que je sens de l’humiliation?
  • Quels sont les scénarios que j’ai en tête (ex.: mon ou ma partenaire va nouer une relation avec un ou une collègue)?
  • À quel point mes émotions et pensées jalouses me préoccupent-elles et interfèrent-elles avec les expériences que je vis dans ma relation et à l’extérieur de ma relation?

2. Comprendre comment mes émotions et mes pensées jalouses influencent le choix de mes comportements jaloux

  • Identifier ce que je ressens permet à la jalousie de ne pas s’accumuler. La jalousie qui s’accumule est plus difficile à contenir et pousse davantage à adopter des comportements contrôlants.
  • Quels sont les comportements jaloux que j’ai tendance à utiliser?
  • Comment est-ce que la personne que j’aime pourrait se sentir quand j’utilise ces comportements?
  • Mes pensées et émotions jalouses n’ont pas nécessairement à mener à des comportements jaloux.

3. Me demander comment je me sentirais si ma jalousie était moins envahissante

  • Comment est-ce que ça améliorerait ma relation?
  • Est-ce que je serais capable de mieux communiquer?
  • Est-ce que je ressentirais moins d’anxiété, moins de tristesse? Est-ce que je regretterais moins de choses dites ou faites?
  • Comment est-ce que l’être aimé penserait à moi si j’éprouvais moins de jalousie?

4. Communiquer ma jalousie

  • Une fois que je comprends mieux le signal de ma jalousie, je peux exprimer à la personne que j’aime que j’ai peur de la perdre et que je tiens à notre relation.
  • Au lieu d’accuser l’autre, je fais part à l’autre de mes inquiétudes et de ce que je ressens.
  • Je formule des excuses si j’ai eu des comportements contrôlants ou agressifs qui ont pu blesser l’autre par le passé.
  • J’accueille la réponse de l’autre dans sa totalité, en essayant de ne pas mettre de côté les informations qui ne confirmeraient pas mes croyances.

Nous n’aurons jamais la certitude que l’autre sera toujours là, que notre lien existera pour toujours. On a tout avantage à développer notre tolérance à cette incertitude, plutôt que de faire tourner notre vie autour de la recherche d’indices et de confirmations d’une certitude impossible à atteindre. Plus nous accueillerons cette incertitude et plus nous reconnaîtrons nos émotions, pensées et comportements jaloux, plus nous nous sentirons proche de l’autre, ressentirons son amour pour nous et plus notre lien sera fort.


Merci à la psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier pour la rédaction de cet article.

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